Cool, merci pour ta question Voilà ce que j’en pense et ce que je comprends de ce passage :
[spoiler]Je crois que, si je m’imagine dans la peau de Charlotte, c’est sans doute le fait que le crash était seulement quelques jours auparavant (elle vient de vivre un moment traumatisant et en souffre encore) et le fait qu’elle se rend compte que c’était un test / une manipulation, qui explique sa réaction forte. C’est pas que c’est une idée absurde, c’est que ça ne lui plaît pas du tout d’imaginer ses chefs dire « dites lui de faire une analyse, on verra sa réaction » pour tester sa productivité ; ça lui plaît pas du tout de penser productivité et accomplir sa tâche, et ça peut même paraître déplacé alors qu’elle souffre énormément de sa perte et de sa situation, et qu’elle ne voit pas encore le bout du tunnel.
Il y a en effet cette idée que le travail, en ‹ changeant les idées › ou en fournissant la satisfaction du travail bien fait, peut permettre d’aller mieux (c’était qui ce philosophe grec qui disait que le meilleur remède à la peine amoureuse c’était d’aller travailler aux champs jusqu’à ce que ça passe ?). C’est peut-être vrai dans une certaine mesure : le travail peut donner une fierté, une sociabilisation, une place dans la société, ou aider à s’extraire de schémas destructeurs. Mais à mon avis (je ne suis pas expert), ça vient après, et la priorité quand c’est encore frais comme ça, c’est le soutien affectif et l’expression de la douleur, éventuellement avec un professionnel, pour pouvoir s’exprimer, comprendre, et commencer à reconstruire. C’est prendre du temps pour soi, alors que le travail c’est pas mal du temps pour les autres ; essayer de pousser quelqu’un à travailler alors qu’elle est en souffrance psychologique peut être dans certains cas insensible et relativement violent.
Quand j’ai pensé à la situation (mais je sais pas si j’ai assez appuyé dessus dans le jeu - j’ai essayé dans les situations présentées et dans les réactions de Charlotte), ce qui pouvait poser problème c’est l’écart entre sa situation (besoin de temps, de patience, de parler, de s’en remettre - je pense que c’est relativement général pour un trauma?) et la situation sur Terre (mission épique et historique, la Terre entière a les yeux rivés dessus, beaucoup d’argent dépensé ; mission scientifique mais menée par une entreprise en lien avec des militaires, i.e. une grosse organisation qui veut des résultats et qui emploie des gens dans le but de remplir les objectifs, etc.). Il y a beaucoup d’attentes, d’engouement, et de moyens derrière, et pourtant elle se retrouve dans une situation qui nécessiterait de l’aider, de l’écouter, et de faire que la priorité soit qu’elle aille mieux ; avec dichotomie entre les valeurs de l’entreprise, du progrès scientifique, de la technologie, et de l’autre côté la sensibilité, la patience et les liens humains. En général, on parle beaucoup des premières valeurs (capitalisme, tout ça tout ça) et on y dépense beaucoup d’argent, et les deuxièmes passent inaperçues et sont moins glamour.[/spoiler]
[spoiler]Sinon oui, la psychologie c’est super intéressant mais même plus généralement, les histoires personnelles et les réactions, émotions et sentiments des gens, c’est super intéressant. Y’a tellement de situations différentes et c’est tellement difficile d’imaginer ce que ça peut être d’être un autre, c’est incroyablement riche et fertile d’essayer de comprendre les autres… Et le challenge d’écrire une personne autre, de faire entrer de façon crédible un lecteur dans la tête de personnages, c’est un grand défi et une grande question de la littérature. Et ma pratique de l’impro m’a permis de découvrir des techniques théâtrales (Stanislavsky, mantras, etc) qui permettent de développer sur scène un personnage en faisant ressortir des éléments-clés de la personnalité, et ça permet de faire des choses extraordinaires ! Je trouve tout ça super intéressant [/spoiler]
Merci en tout cas de ta question !