(GROS SPOILERS !) La fin de "Comédie"

Attention, ce fil contient des GROS SPOILERS sur le jeu Comédie de Monsieur Bouc.

Pendant le concours, l’auteur a fourni de nombreuses explications sur le jeu et sa fin. Maintenant que le concours est fini, nous pouvons en parler librement !

Personnellement, quand j’ai lu la fin, j’ai eu l’impression de ne pas l’avoir bien comprise et je ne l’avais effectivement pas comprise du tout ! Quand je lisais « Être acteur, metteur en scène, pilote d’automobile, pilote d’avion, peut-être ! », je me disais que peut-être le protagoniste rêvait de devenir acteur ou metteur en scène dans ce théâtre, plutôt que simple assistant de metteur en scène ; mais alors, « pilote d’automobile » et « pilote d’avion » ne collaient pas… Quant à « Alors que tout était absolument et profondément faux », je me disais peut-être que c’était un commentaire sur la superficialité de ce milieu du spectacle, ou quelque chose comme ça… Quoi qu’il en soit, j’étais loin d’avoir compris par moi-même que c’était une sorte de jeu de rôle grandeur nature ! Quant à la « Deuxième lecture – Le spectacle » des explications de l’auteur, n’en parlons même pas : en fait, sur ce point, je n’ai même pas trop compris les explications de l’auteur non plus… :blush:

(En revanche, je n’ai pas douté un seul instant que c’était bien la fin « gagnante » du jeu. Je ne sais pas pourquoi : peut-être parce qu’il n’y avait pas eu de fin « perdante » avant ? Peut-être parce que les pièces du plan du jeu avaient pratiquement toutes déjà servi, à part les lumières au nord ?)

Il y a déjà eu des réactions sur la fin au moins à ces endroits :

Je cite quelques extraits choisis de ce dernier :

Et vous, qu’avez-vous pensé de la fin de Comédie quand vous y avez joué, et qu’en pensez-vous après avoir lu les explications de l’auteur ?

Si vous regardez la vidéo de la partie en ligne sur twitch, pour nous ça a été assez spécial, parce qu’on a eu la fin dès le début (il suffit de sortir du théatre)… Et effectivement, lue au début, ça collait super bien : tu es sorti du théatre, tu es passé à côté de plein d’aventures, fin. J’avais cependant un petit doute parce que ça mentionnait plein de protagonistes qu’on n’avait pas rencontrés. Mais vite balayés en me disant que c’était volontaire, une manière de plus d’insister sur tout ce qu’on a loupé.

Alors je vous laisse deviner la déception quand on a eu exactement la même fin au moment où on gagnait. On est tout de suite allé lire les explications de l’auteur, et ça nous a laissés dubitatifs. Je pense qu’il manque au jeu des indices à droite à gauche sur le fait que tout le monde joue un rôle, il manque un effet « ah mais oui, tout s’explique » à cette fin, et je rejoins assez Emily Short et Mule Hollandaise. Là, elle tombe brusquement, et en plus n’explique rien. J’ai un peu l’impression de revivre la fin de la série Evangelion (ou pire, le film qui a suivi), avec une déception cependant beaucoup moins grande pour Comédie car l’investissement émotionnel dans l’histoire était beaucoup plus faible de ma part.

Salut à tous!

Je dois commencer par vous remercier de vous être investis dans Comédie, qui est ma première FI. Cet accueil fait chaud au coeur, vraiment. J’ai effectivement beaucoup de corrections à apporter et vos transcripts / réactions me seront très pécieuses pour cela, merci encore.

Dans ce spoiler, quelques explications supplémentaires si vous le souhaitez.

[spoiler]La fin de Comédie est, comme vous l’avez vu, volontairement abrupte. J’aurais certes préféré rallonger la fiction, ajouter de la profondeur et quelques puzzles, étoffer le tout, mais je m’y suis mal pris et je n’ai pas eu le temps de peaufiner. Mais comme je le disais, même avec quelques éléments en plus, la fin de cette FI aurait cependant été la même.

L’idée est que le protagoniste que vous incarnez est tout à fait conscient de la « fausseté » de ce qu’il traverse dans la Compagnie du Nouveau Jour. Un peu à la manière d’un jeu de rôle, cette fausseté est assumée, au point où il parvient à confondre réalité et rôle. C’est là tout l’objet de la Compagnie : permettre de vivre autrement, même si tout n’est que rôle, fausseté. Ainsi, aussi, ce besoin d’une période d’essai : si certaines personnes --comme pour un jeu de rôle, j’imagine-- suspendent cette « mascarade », tout s’écroule et plus personne ne peut croire que ce qu’ils vivent ensemble est vrai. Le spectacle, c’est donc ce faux lien qui rassemble ces acteurs, à la fois en leur faisant croire qu’ils sont quelqu’un d’autre, et en leur faisant croire qu’ils sont réunis par quelque chose qui serait un tant soit peu…réel ou vrai.

J’ai souhaité que cette fin soit abrupte pour forcer le joueur à réfléchir sur ce rapport à la réalité qu’entretiennent les protagonistes avec leur situation et entre eux (Rita est-elle Rita? Si oui, dans quelle mesure l’est-elle?), et, j’espérais, à réfléchir sur notre propre rapport à la réalité, au rôle, dans notre vie et notre société. La « brutalité » de la fin était donc un peu, pour moi, un moyen de créer la réflexion qui suivrait le « choc » du retour à la normale. Pas seulement par sa vigueur ou sa violence, ni par le biais de la frustration qu’elle pourrait provoquer, non, mais bien par ce qu’elle suggère.

Vos réactions m’amènent à penser diverses choses.

Tout d’abord, que j’ai plutôt raté mon effet :smiley: . Vous avez raison et tout cela n’est pas assez expliqué et éclairci. Je pense que je ne donne pas au joueur les moyens de comprendre par lui-même. Il faut que je réfléchisse, maintenant, à la manière de faire cela. Peut-être que la frustration empêche de réfléchir au sens, et je dois aménager ça (provoquer de la frustration ne me plaît franchement pas…).
D’autre part, comme je l’indiquais dans ma note, j’ai souhaité inclure dans cette FI un message, un sens révélé à la fin. Je souhaitais donc suggérer quelque chose et susciter une réflexion. Peu importe que l’on soit d’accord avec le fond, d’ailleurs. Mais surtout, que la FI, l’expérience de jeu et la rédaction tendent surtout vers ce message, que l’aventure en tant que telle ne soit pas le fond de la FI mais juste une porte d’entrée. Bien sûr, ce message est en forme de question. Je crois qu’une FI peut être écrite dans ce but et c’est un des aspects qu’il me plaît d’explorer pour le moment. C’est juste une des choses que j’ai envie de faire avec les FI, sans aucune prétention.

Pour finir -temporairement-, j’espère que vous avez tout de même pris un certain plaisir à parcourir cette FI et que vous comprenez un peu ce que j’ai voulu faire. Je vous demande pardon pour les fautes d’orthographes et les bugs que j’ai laissé courir, notamment cet atroce bug amenant à la fin du jeu (désolé Stormi).

Encore une fois merci de votre implication et de cet échange qui est vraiment le bienvenu![/spoiler]

J’y réfléchis depuis quelques jours, et voilà les remarques qui me viennent :

  • Pour être clairs, pour toi le jeu doit se terminer de façon abrupte ? Ou est-ce que tu veux donner des indices progressifs au sein du jeu pour préparer la fin ? (i.e. est-ce que tu veux que le joueur trouve qu’il y a quelque chose qui cloche mais sans savoir pourquoi et ça sera expliqué à la fin, ou est-ce que tu veux que le joueur s’installe dans une routine qui est complètement désarçonnée par la fin ?) Je pense que la première solution (mettre des éléments qui donnent la puce à l’oreille) est la meilleure si tu veux éviter une trop grande frustration.
  • As-tu réfléchi à la problématique joueur vs personnage principal et à la façon dont ça peut affecter ton message ? Je m’explique : on est dans une situation où le personnage principal sait quelque chose que le joueur ne sait pas, même si le personnage principal n’y pense pas forcément en permanence parce qu’il veut maintenir l’illusion (au passage, la problématique de « qu’est-ce qui se passe dans le cerveau d’un acteur au moment d’une représentation » est très intéressante, même si on sort énormément du cadre de l’IF :slight_smile: ). Par défaut, le joueur va penser que le personnage qu’il incarne n’a pas de personnalité ou de buts distincts de lui-même, c’est à dire cohérence maximale (Zork, Adventure) ; par contre d’autres jeux te font incarner un personnage avec ses propres buts et souvenirs, et les réponses du parser (ou même les mécanismes de jeu, cf « se souvenir » dans Trac) révèlent au joueur des infos sur le personnage, afin qu’il puisse se glisser dans sa peau. Dans ton jeu, le personnage qu’on incarne n’a aucune personnalité propre, donc on a tendance à dire « ah ben c’est moi » et à la fin on révèle que le personnage principal nous mentait - ce qu’on ne soupçonnerait jamais, d’où frustration. Bref, essaie peut-être d’explorer la possibilité de donner une personnalité plus développée au personnage principal ?
  • La remarque précédente montre aussi un deuxième niveau d’interprétation, un peu méta, qui a trait au spectacle et au théâtre : l’IF et le théâtre ont beaucoup en commun. Historiquement, mais aussi en termes de mécanismes, on peut voir l’IF comme un descendant informatique du MJtage de Donjons et Dragons ; on peut aussi tenter de se poser la question « le joueur doit-il être libre ou doit-il respecter la cohérence d’un personnage », ce qui dépend du jeu. Mais si tu veux rajouter un autre niveau d’interprétation dans ton jeu, tu peux aussi te faire la remarque que l’IF, après tout, c’est faire semblant de croire que l’ordinateur joue avec nous et nous décrit un monde, faire semblant de croire à ce monde, et faire semblant de croire que les personnages sont humains alors qu’ils ne sont qu’une suite de « if » et de « switch » (quand on fait trop de bêta-tests, c’est ça qui vient à l’esprit). Pour reprendre ta métaphore, Rita est Rita, mais en fait elle n’est pas Rita, c’est une suite de 0 et de 1. (et une actrice dans la compagnie du premier jour qui joue une accessoiriste) Ca par contre je ne sais pas comment l’intégrer dans ton jeu, mais bon, c’est juste ce qui me vient à l’esprit :slight_smile:

Je n’avais pas encore eu le temps d’y jouer, alors je m’y suis mis aujourd’hui et… je n’avais pas compris non plus. :smiley:

En fait si, j’avais un peu compris (si on peut appeler ça comprendre…). Je trouve que l’ambiance, et certains dialogues étaient particuliers, avaient quelque chose ne sonnant pas naturel. Mais ce n’est pas allé au-delà de ça.

Et comme stormi, j’ai provoqué la fin en sortant du bâtiment, alors ça m’a fait bizarre de trouver la même fin à la fin (ça fait beaucoup de fois le mot « fin »).

En fait, je pense que ça aiderait à comprendre si le nom de la compagnie était mentionné au début. Juste mentionné, sans que l’on sache pourquoi, avec quelques mini-indices subliminaux tout au long du jeu. Mais en lisant le document explicatif, j’ai trouvé que les explications collaient parfaitement à l’ambiance du jeu, alors même si j’ai pas compris tout seul, j’ai trouvé que ce n’était pas tiré par les cheveux non plus.

Enfin bref, ce n’est pas non plus trop mon genre de truc, ces discussions méta-philosophique ou je sais pas quoi, il faut croire que je suis plus du genre « je dois tuer le dragon à coup de hache de guerre enchantée et de boules de feu » ! :laughing:

Mais bon, dans l’ensemble j’ai bien aimé.

(au passage, c’était voulu, le « Error: no text for mes-final » ?)

Merci du retour, c’est une fois de plus très instructif!

Il y a effectivement beaucoup de bugs (dont le error no mes-final…) et beaucoup de fautes narratives. Je suis encore en train de décanter tout ça, et effectivement c’est possible que la Compagnie du Nouveau Jour doive être amenée beaucoup plus tôt. J’ai une ou deux idées là-dessus je vous en reparlerais…

Sinon, j’aime bien aussi tuer les dragons avec des haches de guerre enchantées et des boules de feu :wink: Et justement, je crois que le problème c’est aussi que mon message est livré de manière beaucoup trop sèche, presqu’uniquement dans le pavé d’explication, pas vraiment (du tout) dans le jeu lui-même. Ce message devrait être beaucoup plus intuitif, ne pas donner l’impression d’une discussion métaphysique, parce c’en est pas une normalement. Je dois repenser ça aussi.

Bref, merci pour ton avis :wink: